jeudi 22 juillet 2010

Vidéo



Voici un petit vidéo de la route entre Léo et Ouaga...un petit aperçu finalement!

lundi 5 juillet 2010

Ah le temps !

Vous avez l’impression que le temps vous file entre les doigts, que vous n’arrivez jamais à faire tout ce que vous aviez prévu, qu’il est primordial de tenir un agenda détaillé pour atteindre vos objectifs, que le temps c’est de l’argent même ?!? Rien de trop surprenant !

En fait la société canadienne à une vision du temps dites monochronique, ce qui est diamétralement opposé à la vision burkinabé, qui elle est polychronique. Afin de vous illustrer ce que j’entends par là, je me permets de citer mon ami Issa, un burkinabé qui habite à Sherbrooke depuis quelques années déjà :

« Ici (en parlant du Canada), vous courrez après le temps, au Burkina, on prend le thé pour perdre le temps. »

Ainsi, la vision du temps est très différente pour les deux peuples. Or, pour quelqu’un issu d’une société qui prône avant toute chose l’efficacité, il peut devenir frustrant d’essayer d’évoluer dans un monde si flegmatique face au temps. Toutefois, c’est avec un certain relâchement qu’il devient possible de réaliser que le taux de stress d’un individu a une très forte corrélation avec cette perception temporelle. Nul doute qu’un certain équilibre entre les deux dimensions culturelles est souhaitable pour la plénitude de chacun. Cependant, l’atteinte de ce louable objectif n’est pas chose aisée.

Afin de vraiment bien vous faire saisir la marge considérable qui existe entre ces deux visions du monde, je propose de dresser un portrait des deux journées de rencontre qui se sont tenues en début de semaine à la FEPPASI (Fédération provinciale des professionnels agricoles de la Sissili- mon organisme partenaire).

Tout d’abord, un peu de contexte. La FEPPASI est une fédération qui regroupe plus de 12 000 producteurs agricoles dans la province de la Sissili, dans le sud du Burkina Faso. Cette structure emploie une trentaine de personnes qui travaillent directement avec les paysans afin de faciliter la passation d’une agriculture de subsistance à une agriculture de marché et ainsi réduire la pauvreté au sein des familles de producteurs. La fin de juin était synonyme de fin de semestre pour la FEPPASI. Ainsi, la structure a pris soins de regrouper tous les membres de son personnel terrain et de gestion pour faire le point sur les activités passées et celles à venir. C’est donc pendant deux jours que se sont rencontrés environ trente-cinq personnes dans les bureaux de la fédération.

Lundi, 10h30, toutes les personnes attendues sont finalement arrivées à la FEPPASI à l’exception du président. La rencontre peut donc commencer comme la présence de ce dernier n’est ni assurée, ni essentielle au bon fonctionnement de la réunion. Le coordonateur des programmes prend donc le rôle de facilitateur pour l’occasion. Une quinzaine de personnes sont assises autour de plusieurs tables formant un U et faisant face à un mur blanc où est projeté l’information. Les vingt autres personnes sont assises derrière, sur des chaises ou encore des bancs, un peu en retrait, ces derniers sont pour la plupart les animateurs venus des différentes communes (une commune est un village). La première étape consiste en la restitution du bilan du dernier semestre par les conseillers (le conseillers est la personne en charge de l’exécution des appuis sur le terrain) des différents villages. Trois conseillers font à tour de rôle leur présentation. Ces dernières sont plutôt monotones et font le point sur les mêmes objectifs qui avaient été fixés globalement. Les conseillers utilisent un support visuel, c'est-à-dire le tableau word dans lequel ils ont compilé leurs données. La participation des autres personnes présentes est très limitée. Or, les employés de bureau de la FEPPASI prennent le temps de poser quelques questions sur les activités décrites.

Un débat est d’ailleurs relevé par la chargé en communication quant à la prise en considération des femmes. Un bailleur de l’organisation suisse, qui finance majoritairement la FEPPASI, présent pour l’occasion avait d’ailleurs lancé le débat dès le début de la rencontre en mentionnant l’absence totale de femmes à la réunion. En effet, nous n’étions que trois femmes présentes, c’est-à-dire la chargé communication, mon homologue et moi-même, donc aucune femme du terrain. Un des conseillers répond d’ailleurs à cette préoccupation en disant qu’il ne faut pas oublier que la compréhension intellectuelle chez les femmes n’est pas aussi élevée et qu’il est donc difficile de les inclure dans les activités. Ouf, c’est chaud ! Les commentaires fusent de toutes parts, le chaos est lancé !

Trois heures plus tard, avec une audience calmée, un peu trop calme peut-être même, une pause de trente minutes est suggérée par le coordonnateur. Celle-ci est bienvenue, les personnes s’étant assoupies commençaient à se multiplier et l’attention était devenue quasi inexistante. Pendant la pause, tout le monde se dirige à l’extérieur cherchant l’ombre sous les manguiers pour discuter et manger un sandwich. La pause de trente minutes se transforme bien vite en pause d’une heure trente. Au retour de cette dernière, les trois autres conseillers présentent à tour de rôle le bilan de leur commune. Cependant, contrairement à leurs collègues les précédant, c’est derniers n’ont aucun support visuel. Ainsi, pendant plusieurs longues minutes, ils citent une série de chiffre et de statistiques. La digestion du sandwich aidant, l’obscurité de la pièce et la non-sollicitation des autres participants a un effet dévastateur sur les autres personnes présentes, les têtes deviennent de plus en plus lourdes et les yeux de plus en plus clos. C’est finalement après deux autres longues heures que la rencontre est suspendu pour le dîner. Il est entendu que la session reprendra dans une heure, c’est-à-dire vers les 18h.
Les 18h se transformèrent en 21h. Les 8h du lendemain en 9h et les prévisions pour le semestre à venir en l’éclatement des frustrations des membres du bureau pour la non-participation de l’équipe terrain et celles de l’équipe terrain pour la non-considération des réalités du travail dans la brousse. C’est par intervalles de discussions entrecoupés par des appels téléphoniques sur les cellulaires de chacun que la deuxième journée s’est close sans résultat pour le semestre à venir, mais plutôt le fardeau sur les épaules de l’équipe terrain d’établir les attentes pour les mois à venir sans la consultation des gens qui auront à remplir ces attentes.

Ce type de rencontre en est une caractéristique des réunions que j’ai eu à vivre jusqu’à maintenant au Burkina Faso. Elle met bien en lumière les distinctions entre la conception du temps monochronique et celle polychronique. Tout d’abord, les personnes ayant une vision polychronique perçoivent les interruptions comme difficilement évitables et souvent bénéfiques (ex : prendre un appel téléphonique alors que nous sommes en train de faciliter une session) alors que pour les personnes ayant la vision monochronique, les interruptions devraient être évitées autant que possible.

Une différence importante se situe également au niveau de la conception du temps. Alors que pour les gens ayant la vision monochronique, il est important de respecter l’horaire, pour ceux ayant la vision polychronique, mieux vaut terminer la tâche peu importe l’horaire (donc reprendre à 21h plutôt que de couper un peu dans les pauses).

Pour les gens ayant la vision polychronique, les dates limites sont relatives et ne devraient pas trop être prises au sérieux alors que pour ceux ayant la vision monochronique, elles constituent une promesse et comme plusieurs autres choses dépendent d’elles, elles doivent être respectées. Ainsi, dans cette situation, bien que la date limite pour les rapports et les présentations avaient été fixés plusieurs semaines à l’avance, plusieurs des conseillers se sont retrouvés à faire leur rapport la journée même et à ne pas avoir de support visuel par manque de préparation. Toutefois, ce manque de préparation ne doit pas être interprété comme un manque de sérieux dans son travail, mais plutôt comme une conception différente des dates limites.

D’autres caractéristiques des personnes ayant une vision du temps polychronique est par exemple la tendance qu’on les gens à tous se lancer vers le plat de sandwiches plutôt que de faire la ligne pour les recevoir un à la fois comme les gens ayant une vision monochronique feraient. Aussi, les gens ayant la vision monochronique sont davantage orientés vers les personnes que les tâches, ainsi ils prennent le temps de discuter de sujets personnels pendant les heures de travail. Ces discussions sont d’ailleurs très importantes pour eux, ils accordent beaucoup de valeur à leurs relations. Quant à eux, les gens ayant la vision monochronique attendent pour entretenir ce type de discussions pendant les pauses comme ils sont tellement orientés vers la tâche. Finalement, alors qu’un agenda est très important pour les personnes avec la vision monochronique, pour ceux ayant la vision polychronique, un agenda n’est qu’un bout de papier et sera inévitablement changé.

Bref pour les gens ayant une vision monochronique, le temps est une donnée immuable. Les gens sont des variables et doivent s’ajuster au temps alors que pour les gens ayant une vision polychronique le temps est le servant et l’outil de l’homme. Il n’y en a toujours plus, et l’homme n’est jamais assez occupé pour refuser de faire quelque chose.

Ainsi, voici une des réalités avec laquelle je dois jongler au quotidien. Je dois apprendre à vivre un équilibre au niveau de ma vision du temps si je ne veux pas être trop frustré face à mes collègues et par le fait même, si je ne veux pas provoquer des frustrations chez eux non plus. Cette différence de perception fondamentale est tellement riche à mes yeux et rend notre planète tellement plus agréable à découvrir. Le défi demeure de trouver un terrain d’ententes.

samedi 3 juillet 2010

Après la triple mission de l’école québécoise, voici la triple mission d’un blog d’une québécoise en terre burkinabé

On dit de l’école québécoise qu’elle doit instruire, socialiser et qualifier les jeunes. Et bien, j’aimerais que mon blog, lui aussi, atteigne trois objectifs, quoiqu’un peu différent. Effectivement, à travers les différents billets que je publierai, j’espère informer, instruire et socialiser mes lecteurs.

Informer : Fournir de l’information sur ma situation, ma santé, mon énergie, mes activités, mes découvertes, mes hauts et mes bas. Bref, ma vie au vie au Burkina. Jusqu’à maintenant, je me suis seulement concentré sur cette mission à travers mes billets. En vous informant, j’ai la garantie que personne ne s’inquiète pour moi de l’autre côté de l’océan. De cette manière, ma famille, mes amis et toutes ces personnes que j’ai laissé derrière pour un temps savent ce que je deviens.

Instruire : Mes apprentissages sont multiples dans ma vie et mon travail au Faso. Ingénieurs sans frontières m’offre un cadre d’apprentissage hors du commun. Ainsi, je souhaite partager mes nouvelles connaissances avec vous afin que vous aussi vous puissiez progresser intellectuellement en me lisant de votre salon. Il serait égoïste de conserver toute cette nouvelle information pour moi seule.

Socialiser : Depuis quelques années déjà, le monde s’est ouvert. L’accès à l’information et aux gens est de plus en plus facile. L’avion est devenue une commodité pour les peuples d’occident. Les échanges entre les différentes cultures sont de plus en plus fréquents. Malencontreusement, les frictions entre ces personnes d’origines différentes sont elles aussi beaucoup plus coutumières. Si je pouvais seulement changer une chose sur toute la planète, ça serait de rayer l’ignorance face aux autres populations qui peuplent la planète. L’incompréhension et la haine naissent de cette ignorance même. Ainsi, par l’entremise de mes billets, j’espère mettre fin à une partie de cette ignorance et faire de mes lecteurs des citoyens du monde qui saisissent les valeurs, les croyances et les défis des gens du Burkina Faso. Vous serez sans doute choqués par certaines des choses que j’écrirai. Cependant, je vous supplie de pousser votre réflexion au deuxième niveau. La différence dérange, mais c’est ce qui fait la beauté du monde. Si nous étions tous identiques, qu’y aurait-il à découvrir, à comprendre ? Je tenterai de demeurer neutre dans mes commentaires, mais je ne peux nier mes origines occidentales qui me poussent à avoir une perception biaisée. Or, je tiens à accentuer le fait que je crois profondément que ni la société canadienne, ni la société burkinabé n’est meilleure que l’autre. Les deux peuples ont leurs forces et leurs faiblesses. J’espère vous ouvrir les portes d’un autre univers qui rassemble pourtant des êtres humains identiques à ceux du Canada en ce sens qu’ils sont des êtres dotés de sentiments, de besoins et d’un profond désir de bien-être et d’accomplissement pour eux-mêmes ainsi que pour tous leurs pairs.

Voici mes trois missions au cours de ces vingt-et-un mois de partage avec vous. Je vous présente mes trois objectifs de cette façon, car je veux demeurer imputable face à vous. Cette expérience, je ne la vie pas seulement pour moi, je la vie pour nous. Chaque fois que je n’atteindrai pas mes buts de partage, je vous supplie de me ramener à l’ordre, de me questionner, de me pousser dans mes réflexions, de me critiquer. De la même façon, quand j’aurai su les atteindre, vous êtes invité à me le notifier. Cette écriture, je la fais pour nous. Je veux qu’elle vous soit utile. Je souhaite que vous appreniez, que vous soyez rassurés, mais surtout que vous compreniez ce qui me pousse intrinsèquement à être ici plutôt qu’ailleurs à ce moment dans ma vie.

Merci de m’être fidèle, vos commentaires sont un moteur d’énergie inestimable pour moi.